vendredi 15 mai 2015

Malinois & Border !

L'Excellent Dresseur Mike Fransen et son Impressionnant Malinois Hazard Van't Muizenbos.

A t’entendre, on note que le Malinois est surtout fait pour Travailler ?
Je n’en suis pas persuadé... c’est un fait ! Le Malinois est un chien d’utilisation et l’utilisation commence par la compétition, puisque les lignées ont été conçues de la sorte. Les gens peuvent me dire ce qu’ils veulent sur le Malinois et que pour eux, ils préfèrent ceci ou cela… c’est une perte de temps, un vrai Malinois de travail : c’est sur un terrain que tu l’étudies et par le biais d’épreuves précises et si les exercices sont rétribués avec les bons pointages, c’est-à-dire si la discipline place les excellents avant les bons, nous continuerons à élever dans de bonne condition. En clair, plus ta discipline sera efficace… plus les chiens qui affronteront cette disciple seront forts, c’est aussi simple que ça !
D’où l’intérêt de cette page sur le Berger Belge et le Ring ?
Et oui, puisqu’en France le Ring est aussi populaire que sélectif. Il faut bien commencer par quelque chose et la priorité des priorités… c’est d’abord de nous parler, de nous rassembler : que souhaitons-nous et où allons-nous ? Si nous voulons améliorer la sélection, il faut des changements et si nous voulons plus pousser la compétition au détriment de la sélection, nous devons le savoir. De cette façon, nous pourrons travailler en conséquence et surtout expliquer aux jeunes générations « les fondamentaux ». C’est-à-dire pourquoi, il faut accentuer un gros pointage ici plutôt que là, etc… Il y’a un énorme décalage avec la jeune génération de Ringueurs, et je le dis souvent : Attention avec eux, ça va vite, ça dresse bien et c’est très propre dans la conduite. C’est pour cela, qu’il faut un dialogue, oh non pas pour jouer les moralistes de service, mais juste pour leur expliquer par où nous sommes passés, pour qu’aujourd’hui ils profitent de ce type de chien. Pour ça, Internet est un outil formidable, il suffit juste de nous parler et d’expliquer, car l’avenir est bientôt entre leurs mains.
L’avenir du Malinois ?
L’avenir de toutes les sélections, de toutes les disciplines et de toutes les races vouées au travail. Le fait est que le Malinois reste et restera le meilleur, ceci est une certitude…
Au début de notre discussion, tu parlais d'une seconde race ?
Au niveau de l’utilisation et de la sélection, oui. Sans hésitation : le Border. Parce qu’il prétend aux mêmes références. Ce chien n’est jugé que sur ses compétences et si demain, quelqu’un s’amusait à définir un standard précis du Border, il aurait tort et vouerait la race à sa perte.
Comment analyses-tu cela ?
Je pense tout simplement que Mère Nature a encore son mot à dire. Les éleveurs-utilisateurs n’ont jamais souhaité un beau chien, mais un standard qui favorise les aptitudes. D’ailleurs, qu’est-ce qu’un beau chien ? Vis-à-vis de qui et de quoi ? D’après Kant « L’agréable est ce qui plaît aux sens », j’aime à penser que chez le Malinois, le bon illumine le beau. Je me rappelle d’une réflexion de Mr Debonduwe : un jour où quelqu’un lui parlait du type d’Othar. Il avait répondu qu’on ne disait pas d’Othar qu’il était beau mais champion de France (rires). C’était répondu avec tact et franchise et après une telle phrase, que peux-tu rajouter ? En plus, nous avons assez à faire sur la sauvegarde d'une bonne santé et sur l’amélioration de l’atavisme, c’est déjà un gros boulot !

OTHAR de la Noaillerie : L'Empereur du Ring !
 
Pourtant, certains scientifiques ne sont pas d’accord avec ce principe ?
Sur l’atavisme ? Peut-être... sauf que le gros problème de nos vénérables scientifiques réside dans le fait qu’ils ne pratiquent guère et leurs interrogations viennent principalement de là ou d’une érudition "purement" théorique. La théorie : c’est très bien et il faut l’étudier, mais comme je l’ai souvent expliqué "rien ne remplace jamais la pratique", car souvent, nous avons des surprises avec la pratique ! D’ailleurs, si nous partons du principe que l’atavisme n’existe pas ou peu, pourquoi le Malinois est-il le seul chien à haut niveau ? Comment se fait-il qu’à 7 semaines, un chiot sache se positionner sur une caisse, qu’il morde immédiatement et qu’un expert puisse identifier précisément sa famille rien qu’en l’observant ?

Mr Rolland Thibault sans qui, rien n'aurait été possible.
 
D’ailleurs ça, c’est incroyable !
Certes, c’est un métier. En France, j’ai vu souvent Rolland Thibaut ou Eric Cavaillé définir un caractère rien qu’en observant un malinois. Personnellement, je suis un adepte du découpage morphologique. Je regarde absolument tout : tête, aplombs, masque, poitrail, démarche, etc. Mon œil y est exercé, c’est automatique. Néanmoins, avec les dilutions de grandes lignées, l’exercice devient difficile et seules les familles marquées m’indiquent une lignée…

Mr Eric Cavaillé & Luc Vansteenbrugge parfaitement entourés. Respectivement éleveurs du Cami de Cathéric et des 2 Pottois, l'utilisation Internationale leur doit beaucoup.
 
Tu penses que tout est lié et que la prise, le caractère, la garde d'objet, voire l’artifice peuvent se définir ?
Oui, absolument. Je dirai même que c’est indéniable. Prenons deux éléments simples : la prise et la garde. L’une et l’autre appartiennent au chien. Celui qui est né gardien, tu le sais vite. Pour la prise, si tu as un H-A intelligent, c’est encore plus facile. Tu devines, en observant le chiot, si il tire ou pousse, si il se bloque ou se tétanise et si il préfère crocheter ou rengamer dans une grosse toile. Encore que, ce dernier exemple peut aussi définir la fulgurance. En tout cas, l’étude du mordant dans le choix et la détermination de la prise indiquent une continuité. Il se peut que tu te retrouves devant un chien qui se lasse d'une légère toile et réclame plus de consistance, type gros boudin ou jambière. C’est plus fréquent qu’on ne pense, notamment sur des purs belges.
Ce serait donc lié à leur culture ?
Entre autres. À leur nature également : un Malinois Belge aime en avoir jusqu'aux oreilles. Il est d'ailleurs très rare – pour ne pas dire improbable – qu'un Apache Belge propose une toile de débourrage. En général, il attaque directement avec des manchons (ou jambettes Belges). Le chiot se cale et pousse, ce qui impose une double culture pour, exemple : préparer correctement un Malinois de type Flamand en France. Après, il y a les exercices imposés. Fort heureusement, nous sommes sur un registre identique : obéissance, sauts et mordants. Sauf qu'en Belgique, les parcours ne sont jamais identiques, il n’y a pas de fuyante ni d'attaque lancée en garde au ferme (elle est étudiée durant l'escorte et pas forcément sur des changements de jambe). Donc l'aspect technique se doit d'être assimilé rapidement et c'est là que nous découvrons la force brute du Malinois Belge car, s'il est convenablement guidé, il s'adapte en France. Alors qu'un « French-Ringueur » typique a beaucoup plus de mal à s'imposer en Belgique, surtout sur le programme NVBK. Pourtant, il ne s'agit pas d'une histoire de courage ou de confrontation car un chien de Ring Français est tout aussi pétri de qualités… Non, en fait, le problème tourne autour de la prise conjuguée à l'artifice, car traverser un artifice sans réfléchir est une chose et structurer une prise pleine gueule dès la sortie de l'artifice en est une autre. Bref, la grosse difficulté est de lier les deux sur une attaque toujours changeante.

Erkus des Lycans d'Arget : La Classe au service de la Fougue !
 
Pourtant, on reconnaît bien le style Mondio sur la percée d'artifice, non ?
Pas toujours et le problème est là : je me souviens d’une finale Belge où il n'y avait pas d'artifice visuel. Le chien traversait le terrain, enjambait une bâche et sautait sur une estrade. Il attrapait l'Apache et soudain, l'estrade se mettait à vibrer dans un boucan d'enfer… OK, il vaut mieux avoir les nerfs solides (rires), de plus, comment tu prépares un truc pareil ? Il faut déjà avoir l'idée, puis le matériel !!! Idem sur un autre parcours : le chien devait saisir l'H-A qui le réceptionnait avec deux gros sacs remplis de mousse et pendant qu'il testait son courage, un compère sortait d'une cache en hurlant et en le molestant avec un sac identique. Ces deux mises en scène m'avaient fortement troublé et je pense qu'à l'instar des kamikazes Hollandais, les termes « courage, stabilité et passion » ne sont pas trop forts !

Voici un Superbe Saut de Fossé : MARCO à Hoboken en 1998.
 
Peut-on tester les dispositions d’un chiot malinois face à l'artifice…
Oui, je le pense, mais avant de placer un chiot face à son destin, il faut d’abord l'analyser dans la vie. Perso, j'ai toujours regardé ses comportements, surtout devant les difficultés visuelles. Exemple : quand tu lances une balle dans un bosquet, tu découvres trois cas : celui qui fonce dans le bosquet, celui qui y va mais pas trop rassuré et celui qui fait le tour. Je vais donc positionner ce schéma sur une prise mais avant, je détermine s’il préfère le haut ou le bas.

Tu veux dire s’il préfère attraper les bras plutôt que les  jambes ?
C'est plus compliqué que ça mais oui, en quelques sortes. Il y a une méthode que j'ai vu chez Philippe Desamblanc qui consiste à planter deux piquets à environ 2 mètres l’un de l’autre. Ensuite, tu tends une bande en plastique (type rubalise ou un peu plus large) en laissant de la place en dessous. Tu te positionnes avec un boudin derrière et tu demandes à un copain de lâcher le fauve. Là, le chiot n’a qu’une envie : t’attraper. Alors tu recules gentiment, histoire de voir comment le bougre place le coup de rein décisif et là, tu vois s’il passe par au-dessus ou dessous. Tu réitères plusieurs fois et s’il reste sur le même schéma, ce n’est pas parole d’évangile, mais tu as une petite idée sur sa nature.
Le Ring Belge : Quand l'Efficacité se conjugue avec la Performance !


Il y a donc des chiens prédestinés en haut ?
En voilà une bonne question (éclat de rires…) ! Les Belges disent que nous « Français », nous avons toujours un nom savant pour déterminer un mauvais chien : Tu as : aérien, demie-gueule, bout de gueule en séchage, bec, etc. Mais c'est notre discipline qui nous l'impose, car eux comptent le mordant et nous, nous le décomptons. Alors, au grand dam de mes collègues : oui, j’en suis convaincu. Il y a des aériens naturels et je réfute complètement la théorie : « Un grand chien doit mordre aux jambes ». Cela dit, je pense qu’un bon chien doit faire son taf et ce, quoi qu’il arrive. Attention, je ne dis pas que certains dresseurs très habiles n'ont pas déguisé le travail de leurs chiens qui, fort disponibles mais trop friables, ne supportaient pas la pression d’un bonhomme sur la jambe. Je dis simplement qu’il y a des chiens qui montent par conviction profonde, comme d'autre pulvérisent les artifices. Parce que si on recommence l'exercice que je viens de t’expliquer en obstruant légèrement la partie vide et que le chiot retraverse à la même vitesse, j’ai encore une indication. Il ne me reste ensuite qu’à alterner les artifices : eau, cerceau, petite bâche, etc. Si le chiot franchit n’importe quoi, avouez que c’est troublant quand même ? Soit il est inconscient, soit le désir de mordre est plus fort que tout, soit l'artifice est intégré dans son cursus, soit l'ensemble fait désormais partie de son quotidien. Il n'y a plus qu'à creuser la question. D'ailleurs, sur ce point, imaginez un Ringueur qui achète un Malinois : est-ce qu'il demande à l'éleveur si le père de son futur chiot avait peur du bâton ? Non, au grand jamais ! Il part du principe que cet élément est parfaitement intégré. Pourquoi un chien Belge n'aurait pas droit à ce privilège sur l'artifice ou sur la stabilité de sa prise ?
Comment t’es-tu aperçu de cela ?
En étudiant certains critères dans le cadre d’une analyse des divers courants de sang. Je visionnais un vieux film, dont voici le sujet : un jeune Malinois part vivement, accélère pour arriver à 3 mètres de l’H-A. D’un coup, il se bombe, ré accélère et frappe avec force l’Homme d'Attaque. Bien que la face ait été typiquement « Ring Français », j’ai trouvé que dans l’attitude, le Malinois avait anticipé l’attaque comme s’il franchissait un artifice. Sa détermination était telle qu’il ne voulait pas perdre : il voulait l’attraper, quoi qu’il arrive. Depuis, cette image m’a suivie et je me suis concentré pendant très longtemps, sur le franchissement de l’artifice, l’entrée d’attaque de toutes les disciplines est devenue mon leitmotiv, pire... mon obsession ! Ce qui m’a amené sur d’autres terrains : la résistance sur de l'inédit et les différences de tempérament, comme le potentiel, le caractère, la stabilité, l'équilibre et le fameux standard qui me rappelle curieusement cet adage : « La beauté du corps, découronnée de celle de l'âme, n'est qu'un ornement ». C'est tellement vrai !

 
Pour les amateurs de Border, je vous invite à lire le superbe livre de Jean Piacentino. Un grand Merci à Laura, Nathalie, Philippe, Christophe, Pascal, Fabrice et quelques autres. Le chiot couché et la tête dans la jambière se nomme Guevara du Tison d'Argence en sélectifs cette année. A bientôt avec la suite  prochainement…

1 commentaire:

  1. Bonjour,
    Le berger Belge est un chient exceptionnel,
    un caractère coupé au couteau.
    Une petite faiblesse du train arrière qui apparaît avec l'age, un reste des efforts partagés.
    Cordialement

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